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Distribution d'eau à Evegnée

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ÉTABLISSEMENT D'UNE DISTRIBUTION D'EAU A EVEGNEE (1908-1910) POUR LES COMMUNES DE BELLAIRE, JUPILLE ET BRESSOUX

(voir album photos complet en fin d'article)

MÉMOIRE EXPLICATIF

Avant propos

Le captage des sources d'Evegnée a été projeté à différentes reprises, au profit de l'un ou l'autre groupe de communes.

En 1896, l'un de nous présentait un projet de distribution d'eau pour les hauteurs d' Argenteau et les communes de Cheratte, Wandre, Jupille (centre) et Bellaire. Dans la note à l'appui de ce projet, on faisait ressortir que les hauteurs d'Argenteau, de Cheratte et de Wandre ne pourraient trouver leur alimentation en eau que dans des puits creusés dans le terrain houiller peu favorable à une eau saine et abondante. Quant aux parties basses de Wandre et de Cheratte les niveaux des eaux de leurs puits subissent, pour la plupart, les fluctuations des crues de la Meuse. Le centre de la commune de Jupille était également desservi par des puits publics, mais depuis quelque temps leur débit est tellement réduit que l'alimentation en eau potable de ce centre important est tout à fait compromise. La commune de Bellaire a du créer, à grands frais, des puits publics, mais leur débit est insuffisant pendant la période estivale.

En 1898, Mrs Beaulieu et Halleux ont présenté un projet basé sur l'utilisation des sources d'Evegnée et de Fouron-St-Pierre. Les premières, dont le captage était prévu à l'altitude de 224,18 étaient destinées à l'alimentation de la commune de Bellaire et des hauteurs de Jupille, de Wandre, de Cheratte, d'Argenteau, de Grivegnée, de Chênée et de Vaux-Sous-Chèvremont. La source de la Commanderie ou de Fouron-St-Pierre devait desservir les communes de Berneau, de Bombaye, de Dalhem, de Richelle, de Bressoux ainsi que les bas des communes d'Argenteau, de Cheratte, de Wandre, de Jupille, de Grivegnée, de Chenée et de Vaux-Sous-Chèvremont.

En Avril 1901, Mr. Halleux présentait un avant-projet de distribution d'eau basé sur le captage des eaux souterraines d'une partie du pays de Herve, au profit des communes de Bellaire, de Wandre, de Jupille, de Bressoux, de Grivegnée et de Chenée.

En novembre 1902, un avant-projet émanant de Mrs Beaulieu et Halleux prévoyait l'utilisation des sources d'Evegnée au profit des communes de Wandre, de Bellaire, et des hauteurs de Jupille, de Grivegnée et de Chenée. Le bas de ces trois dernières communes ainsi que celles de Bressoux, d'Ougrée, de Tilleur, de Jemeppe, de St-Nicolas, de Montegnée, de Grace-Berleur et de Hollogne-aux-Pierres étaient alimentées par la source supérieure du « Néblon »

A la demande de différentes administrations communales, diverses solutions ont été présentées, toutes relatives à l'utilisation des sources d'Evegnée au profit de l'un ou l'autre groupement partiel des cinq communes de Bellaire, de Wandre, de Jupille, de Bressoux et de Grivegnée. Ces différentes solutions ont donné lieu à de nombreuses réunions présidées, la plupart, par MM les délégués de la Députation permanente et finalement seules les communes de Bellaire, de Jupille et de Bressoux ont réclamé l'élaboration du projet d'utilisation des sources d'Evegnée

NOTE A L'APPUI DU PROJET

Etat actuel de l'alimentation

L'alimentation en eau potable des communes de Bellaire, de Jupille et de Bressoux est assurée tant bien que mal par des puits publics ou particuliers. Nous croyons qu'à l'heure actuelle, tout le monde est d'accord pour admettre que ce mode d'alimentation ne présente aucune garantie tant sous le rapport de la qualité des eaux que sous celui de leur quantité. En ce qui concerne spécialement Bressoux, cette commune se trouve dans l'obligation de construire un réseau complet d'égouts et ce travail d'assainissement quoique d'une impérieuse nécessité se voit forcément ajourné par suite du manque d'eau pour le fonctionnement des appareils de chasse.

Sources à capter

Le terrain aquifère qui donne naissance aux sources d'Evegnée à fait l'objet d'une étude spéciale de Mr Halleux et les conclusions obtenues sont consignées dans un livret où on y trouve notamment une analyse de l'eau dont voici les résultats:

  • les cultures donnent 4 microbes vulgaires par c.c.
  • pas de nitrites peu de chlorures et de nitrates.
  • dureté totale :10 degrés allemands (2 degrés inférieure à celle de Liège) Ces eaux, après s'être infiltrées dans le limon, traversent d'abord le conglomérat à silex, ensuite la craie à la base de laquelle elles sont arrêtées par la smectique (argile). Elles sont donc de la même origine et par suite de la même qualité que celles de la ville de Liège.

Pour apprécier non seulement l'importance de ces venues d'eau mais aussi l'influence des travaux de captage, il convient de faire connaître que ces sources ont été mises en observation de Mai à Décembre 1905, à l'aide de 4 jaugeurs :

Le premier, établi à l'aval de la prairie Bony(dans le Foeïtay) a fait connaître que le débit minimum de la source du versant gauche de la ravine de Retinne, était descendu, en septembre, à 3 litres 46 à la seconde.

Le second déversoir, placé à l'aval du point de réunion des sources des 2 versants de la ravine de Retinne a accusé un débit minimum de 9 litres 55.( rue du Thier)On serait tenté d'induire, par différence que le versant de droite possède un débit de 6 litres 09. Or entre ces deux jaugeurs et sur le versant de gauche, existe dans la prairie Lewalle, une source d'un débit de 0 litre56 qui échappera à notre captage. Pour recouper cette venue d'eau, il eut fallu prolonger la galerie supérieure vers le village d'Evegnée. Nous avons voulu éviter autant que possible, de nous approcher de cette agglomération avec nos travaux de captage. Au surplus, nous estimons que cette venue d'eau doit être réservée pour satisfaire à certains besoins de l'agglomération d'Evegnée. D'autres suintements que nous avons évalué au jugé à 0 litre10 par seconde, se font également jour à l'amont des galeries et échapperont au drainage.

Le troisième jaugeur installé sur la venue d'eau de Matte Fosse n'a pas enregistré un débit inférieur à 4litres.Si on fait la somme des débits relevés à ces deux derniers jaugeurs, on arrive à une venue d'eau totale de 9 litres 55 + 4litres = 13 litres 55 tandis que le quatrième jaugeur établi à l'aval de la réunion de toutes les venues d'eau n'a jamais décelé moins de 15 litres 05.Cette différence (15lit05-13lit55 = 1lit 50) provient de l'existence d'une source sourdant de la prairie Henvaux, c'est à dire d'un point situé entre les jaugeurs n ° 3 et n° 4 (derrière l'école).

En résumé, la venue d'eau que l'on peut espérer recueillir pour les travaux de captage ne sera pas supérieure à 15lit05 - (0lit56 + 0lit10) = 14 lit 39 et si on s'en rapporte aux résultats des jaugeages effectués en 1896, 1897 et 1900, on doit admettre que ce chiffre pourrait descendre à12litres70 pendant les périodes de grande sécheresse, soit à une venue d'eau de 1097m³ 260 par 24 heures.

Répartition de cette venue d'eau

Ainsi qu'on le constatera ultérieurement, cette venue d'eau n'est point suffisante pour satisfaire aux nécessités présentes et futures des agglomérations à desservir mais, ainsi que nous l'avons déjà fait connaître, il y a lieu de parer sans délai, aux pressants besoins actuels.

Nous devons également faire remarquer que lorsque la venue d'eau devra être augmentée, il faudra reporter les travaux de captage à 4750mètres au delà d'Evegnée et que ce travail relativement coûteux ne sera décidé que lorsque la nécessité s'en fera sentir. En tout état de cause la solution présentée actuellement, constitue une partie du projet de drainage du pays de Herve et ne contrarie en rien, pour l'avenir, l'exécution du travail complet. Dans une réunion intercommunale tenue à Bressoux, sous la présidence de Mr le Député permanent Grégoire, il à été décidé que cette venue d'eau de 1097m³260serait répartie comme suit :

  • Bellaire 75m³
  • Jupille 397m³
  • Bressoux 625,26m³ Total 1097,26 m³

Cet arrangement a été ratifié par les Conseils communaux intéressés et approuvés par la Députation permanente. Pour être complet nous ajouterons qu'une convention réglant les questions relatives à la création et à l'exploitation de la distribution d'eau a reçu également l'approbation des communes et de l'autorité supérieure.

Population à alimenter

Les populations des communes de Bellaire, de Jupille et de Bressoux s'élèvent à l'heure actuelle respectivement à 1500, 6000 et 10400 habitants(chiffres ronds). Le chiffre de Bellaire est sensiblement stationnaire, mais pour les deux autres communes et particulièrement pour Bressoux, l'accroissement de la population est telle qu'on peut, sans exagération, admettre que la distribution d'eau aura dans peu d'années à satisfaire aux besoins de 25800 habitants se répartissant comme suit :

  • Bellaire 1.500
  • Jupille centre 7.000
  • Jupille hauteurs 1.300
  • Bressoux centre 15.000
  • Bressoux hauteurs 1.000

Description sommaire du projet

Captage

Les venues d'eau de la ravine de Retinne ainsi que celle de Matte Fosse seront recoupées par trois galeries souterraines dont le radier(fondation) sera établi dans la smectique. Le produit des deux premières sera amené dans une chambre de jauge formant l'œil de la galerie de Matte Fosse.

Conduite d'adduction

La conduite d'adduction partant de ce pavillon empruntera quelques propriétés particulières pour aboutir aussitôt que possible au nouveau chemin d'Evegnée à Saive (rue Matefosse) qu'elle suivra jusque quelques mètres en deçà de la limite de ces deux communes.

A partir de ce point, elle traversera une propriété particulière empruntera ensuite un sentier jusque la rencontre du chemin de Saive à Retinne (Miermont), suivra le chemin de Parfondvaux jusque sa rencontre avec le chemin de grande communication de Saive à Queue-du –Bois qu'elle parcourera sur 90 m environ pour s'engager dans le sentier aboutissant à la gare du vicinal de Haute Saive. Elle suit le chemin de Bellaire à Saive, donne naissance avant de traverser le village de Bellaire au branchement alimentaire du réservoir établi « Chemin de la messe » s'engage dans le chemin dit « des Prés » où elle alimente le puisard jaugeur de Jupille(centre) traverse quelques propriétés particulières ainsi que le ruisseau venant de Fléron, pour aboutir au chemin des Piétresses. A la rencontre de ce dernier avec le chemin de Beyne, elle donne naissance au branchement alimentaire du réservoir des Piétresses puis descend par un chemin de terre dans le « Fondrivaux »pour remonter ensuite par une servitude de passage vers la ferme de Houlleux et de nouveau redescendre vers l'agglomération dite de « Houlleux » qu'elle dessert par l'intermédiaire d'un petit réservoir établi dans le sentier des Bruyères. La conduite arrive ensuite jusqu'au passage à niveau du chemin de fer du Pays de Herve où est érigé le réservoir des Bruyères. Elle traverse le hameau des Bruyères puis suit le chemin dit « des Bassins » reliant la chaussée aux Bruyères jusqu'au puisard de Bressoux.

Réservoirs de pavillons de jauge

Aucune conduite de distribution n'est reliée directement à la conduite d'adduction. Celle-ci déverse, soit dans un puisard, soit dans un réservoir, le volume d'eau destiné à chaque commune et pour Jupille, à chaque agglomération. Par cette disposition, les gaspillages ou les fuites qui peuvent se produire dans l'un des réseaux d'une commune sont sans influence sur les distributions des autres associées. Les réservoirs et puisards sont munis de vannes automobiles empêchant les déversements de trop plein et les jaugeages se font en présence de délégués communaux. Lorsque la chose a été possible, on a donné aux réservoirs les emplacements nécessaires pour dominer d'une hauteur de 20 à 30 m tous les orifices à desservir, mais on s'est trouvé parfois astreint, pour des raisons d'économie ou de convenance, à déroger à cette règle.

Conduites et distribution

Suivant les instructions ministérielles, on ne doit pas descendre en dessous du diamètre de 0,060 m pour les conduites secondaires. Pour les conduites maîtresses, on a calculé leur diamètre sur le débit maximum et pour Bressoux, ce débit a été déterminé en tenant compte d'un notable accroissement éventuel de la population. Cette précaution n'était pas à prendre pour Jupille parce qu'il est possible d'accroître le débit capable de la conduite maîtresse soit en relevant le puisard de jauge, soit en érigeant un second réservoir du côté des Vignes.

JUSTIFICATION DU PROJET

Travaux de captage

GALERIES : Tracé- Pente- Dimensions- Emprises.

Dans l'avant projet, on avait supposé que le captage pourrait s'effectuer au moyen de drains de coteaux, mais suite à une étude plus approfondie, on a reconnu que l'économie relative ne compenserait pas les inconvénients résultant de ce mode de drainage et on s'est arrêté à l'aqueduc souterrain. Ces galeries sont tracées suivant une direction sensiblement normale à celle des eaux et leur pente épouse autant que possible celle de l'argilite. Le niveau de cette dernière a été déterminé par des sondages à la tarière, mais par suite du faible développement de la sonde, ces reconnaissances ont dû s'effectuer aux bords de l'affleurement. Il se pourrait qu'en certains points la « dielle » ne soit plus en place et cette hypothèse expliquerait quelque peu les changements brusques de son inclinaison, dans les galeries de la ravine de Retinne et surtout sa pente exagérée dans l'aqueduc de Matte Fosse. Quoi qu'il en soit les résultats obtenus confirment dans leur ensemble l'idée que l'on avait précédemment de l'allure souterraine de cette couche et peuvent servir de base à l'élaboration du projet. Il est inutile d'ajouter que, par le foncement préalable des puits jusque l'argilite, on obtiendra les données probantes sur le profil à donner à chacune des galeries. Ainsi qu'en témoignent les plans, le fond de la galerie est placé au minimum à 0m40 en contrebas du terrain imperméable.

Il a été fait exception pour la galerie de Matte Fosse à cause de la plus forte déclivité de la smectique, mais nous sommes convaincus que lors de l'exécution des travaux on constatera que cette pente est tout à fait exagérée.

Revêtement – Au fur et à mesure qu'on descend dans la craie celle-ci se durcit au point de réclamer l'emploi de la poudre pour son extraction, mais la profondeur à laquelle sera établie la galerie, la roche n'aura pas assez de cohérence pour se maintenir d'elle même. Nous croyons donc qu'il est prudent de prévoir un revêtement maçonné sur toute leur longueur.

Chacune des trois galeries présente des particularités sur lesquelles nous croyons devoir fournir quelques explications. La galerie supérieure établie dans la prairie de Mr Bony (à droite de la rue Foeïtay ) a 139m20 de longueur drainante.

Le tronçon qui, lui, est normal en direction et qui constitue la galerie d'écoulement a une longueur de 58m80 ; sa section est sensiblement élargie à l'aval pour constituer une chambre de jauge. Il a été dit précédemment que de cette galerie partent deux conduites : l'une portant le produit du drainage au pavillon de jauge de Matte Fosse, l'autre assurant la priorité d'une venue d'eau journalière de 20m³ aux habitants d'Evegnée.

Il a déjà été dit que cette quantité d'eau de carafe était distribuée par une pompe (rue du village) et une borne-fontaine.(rue du Thier) Pour ne plus revenir sur cet objet, disons qu'à ces deux conduites vient se joindre, au droit de la prairie Lewalle, une troisième destinée à amener le produit d'un drain aux deux bacs abreuvoirs et lavoirs, mis à la disposition des habitants d'Evegnée. Nous avons cru qu'une zone de protection de 10 mètres de largeur s'étendant dans la partie drainante à 7mètres à l'amont et à 3mètres à l'aval de la galerie, était suffisante. Dans la galerie d'écoulement, la plus forte largeur a été prévue du côté de la venue d'eau.

La galerie la plus productive en eau, c'est-à-dire celle établie dans le versant de droite de la ravine de Retinne aura une longueur drainante de 80m65. Pour faciliter son accès par une entrée latérale, nous avons prolongé la galerie d'écoulement au delà du chemin de grande communication de Tignée à Saive (rue du Thier) à gauche au descendant.

Comme pour la galerie supérieure, nous avons prévu une zone de protection de 10mètres de largeur sauf dans la prairie où se trouve la galerie d'écoulement. Cette parcelle est tellement morcelée par nos travaux que nous croyons préférable de l'acquérir dans toute son entièreté. Ainsi que l'indiquent les plans, les produits des deux galeries sont amenés par une conduite dans un pavillon de jauge. (rue Matefosse)

La galerie de Matte fosse est établie dans l'accotement du nouveau chemin de Saive à Evegnée (rue Matefosse). Sa longueur drainante n'est que de 65 mètres, mais il est à présumer qu'une partie de la galerie d'écoulement recoupera également quelques venues d'eau. C'est dans cette prévision que nous n'avons pas établi la galerie dans le chemin encavé (celui qui conduit au pavillon de jauge et qui a été partiellement remblayé) où se rencontre l'affleurement de la smectique et où les eaux n'auraient pas été suffisamment protégées.

L'emplacement donné à la galerie drainante se trouvant assez bien en contrebas du terrain avoisinant, nous avons cru inutile d'acquérir de ce coté une zone de protection, mais celle-ci nous a paru nécessaire sur toute la longueur de la galerie d'écoulement. Le chemin (n°16) étant contigu d'un côté, l'emprise dans la prairie Bony ne devra pas dépasser une largeur totale de 7 métres

PAVILLON DE JAUGE

Ainsi que son nom l'indique, ce pavillon abrite les appareils de jauge en même temps que ceux de distribution. Cet abri étant à peu près le seul travail visitable, nous avons cru devoir lui donner un certain cachet architectural et présenter l'eau sous un aspect appétissant en revêtant les différentes cuvettes de carreaux blancs émaillés.

Deux jaugeurs mesurent l'un le produit de la venue d'eau de la ravine de Retinne, l'autre le débit de la galerie de Matte fosse. Une vanne automobile actionnée par le reflux des trop pleins des réservoirs de la distribution fait l'office d'obturateur à la conduite d'amenée des deux galeries supérieures et force ainsi l'eau à s'emmagasiner dans la galerie principale. D'un autre côté, en évitant tout déversement inutile dans les communes, on permet à l'eau excédante de s'écouler comme auparavant dans la vallée d'Evegnée.

Afin de superviser le bon fonctionnement de ce pavillon, un fontainier a été nommé en l'occurrence Mr Lejeune (qui fit construire la première maison dans le chemin de Miermont en 1922).Il fut relayé par Mr Bontemps en 1953 (ci-après, quelques souvenirs recueillis chez ses enfants).

Mr René Bontemps est arrivé à Evegnée en novembre 1953.Il travaillait au charbonnage du Hasard mais ,suite à la demande d'un fontainier ,il a posé sa candidature.Après un examen réussi ,il a été engagé. En quoi consistait sa tâche ?

A heures fixes (9h et 17h )il devait se rendre au pavillon et voir si le chlore gouttait correctement dans les bassins.Il y en avait deux recouverts de carrelage :un grand et un petit.Il fallait les nettoyer de temps en temps.Pour ce faire il coupait l'arrivée d'eau ,laissait le bac se vider et enlevait le dépôt qui était dans le fond.Deux fois par an ,il fallait aussi nettoyer les galeries :frotter la rigole centrale avec une brosse de rue pour enlever les dépôts de terre.

Chaque jeudi il portait des échantillons d'eau au quai du Barbou pour analyse. Il n'a jamais enregistré de problème particulier lors de toutes ses visites.

CONDUITE DE DISTRIBUTION :

Le diamètre de cette conduite doit être tel que son débit capable corresponde aux besoins futurs de la population que nous avons évaluée à 25800 habitants. Dans ce chiffre ne sont pas comprises les populations des communes de Wandre, de Cheratte et des hauteurs d'Argenteau. Si ces communes entrent un jour dans l'association, l'eau qui leur sera attribuée ne pourra provenir que de la galerie drainant les ravines de Mélen et de Noble Haie. La prise d'eau à effectuer sur la conduite d'adduction de ces eaux à Wandre, Cheratte et Argenteau, se fera plutôt à Tignée qu'à Evegnée et il n'y à pas lieu dès lors de se préoccuper de l'alimentation de ces communes, dans le calcul du diamètre de la conduite d'amenée des sources d'Evegnée.

MODE ET REPARTITION DE LA DEPENSE :

Chaque commune intervient proportionnellement au nombre de mètres cubes d'eau qui lui est attribué, dans la dépense à résulter des travaux effectués depuis la source jusqu'au puisard de jauge pour Jupille centre et Bressoux et aux réservoirs d'alimentation pour Bellaire et les agglomérations de Houleux, des Piétresses et des Bruyères, commune de Jupille.

CONSIDERATION DES HABITANTS D'EVEGNEE :

Il nous reste maintenant à examiner le bien fondé des objections qui peuvent être présentées à l'encontre de ce projet. Si l'utilité de ce projet ne peut être méconnue, on ne peut non plus contester que sa réalisation sera contraire aux intérêts de certains usagers des eaux du ruisseau d'Evegnée.

Il n'entre pas dans les intentions des communes de s'abriter derrière les droits absolus conférés par le code civil aux propriétaires des sources. Elles désirent aux contraire aller au devant des réclamations en recherchant la nature du préjudice et en justifiant vis-à-vis de l'autorité administrative, seule juge en cette matière, les dispositions prises pour réparer les dommages causés et, lorsque la chose n'est pas possible, le montant des indemnités qu'elles proposent d'allouer. Ces travaux vont évidemment avoir pour effet de modifier le mode d'alimentation existant des habitants d'Evegnée et de diminuer la force motrice des moulins (3 sur le territoire d'Evegnée).

Les habitants s'alimentent actuellement à deux bacs-fontaines établis, l'un dans le chemin de Matte fosse(chemin n°16)et l'autre au fond du village à la jonction de la ravine de Retinne et du chemin de grande communication de Tignée à Saive(sur le terre-plein au bas de la rue Au Thier).Une pompe branchée directement sur le ruisseau dans le bas de la rue du Thier permettait aussi de s'approvisionner en eau pour le bétail.

Le projet respecte non seulement les droits acquis par la commune, mais il améliore considérablement la situation existante. A Matte fosse, le bac placé dans le chemin creux est d'un accès difficile et l'eau distribuée peut facilement être souillée. A l'avenir une pompe établie sur la galerie donnera de l'eau de qualité irréprochable et un bac sera placé le long du nouveau chemin d'Evegnée à Saive.

Dans le fond du village, une borne-fontaine à jet continu sera alimentée par l'eau de la galerie du versant de gauche de la ravine de Retinne. Deux bacs avec leurs abords pavés recevront l'eau à jet continu du drain établi dans la prairie Lewalle.

Au surplus, le centre du village actuellement privé d'eau sera desservi par une pompe dont l'alimentation continue sera assurée par un réservoir(elle existe toujours actuellement mais son eau n'est plus potable).

En ce qui concerne l'évaluation du préjudice causé aux moulins, il convient de tenir compte de leur situation et de leur importance. Si petit que soit un moulin, il comporte nécessairement une paire de meules réclamant pour leur mise en activité, une force de 4 chevaux. Lorsque le débit du cours d'eau devient insuffisant pour développer cette puissance motrice, on se trouve dans la nécessité d'arrêter le moulin et d'emmagasiner à suffisance l'eau dans un étang pour récupérer la force nécessaire. Tel est assurément le cas pour les moulins établis sur le ruisseau d'Evegnée.

En effet, d'après nos calculs, la mise en activité de ces moulins requiert un débit de 77L seconde or le débit du ruisseau est de 25L seconde et par temps de sécheresse il descend même à 12L70. Le captage va encore diminuer un peu ce débit. Pour la détermination du préjudice causé, nous savons que les moulins établis sur le ruisseau d'Evegnée ainsi que ceux installés sur ce même ruisseau dénommé à l'aval « Ste Julienne » se louaient 800 francs l'an. Pour compenser la réduction de force ou du temps de marche il convient de diminuer la location (soit 132 francs). Cette somme capitalisée monte à 3700 francs. Si on ajoute à celle-ci 500 francs pour la création ou l'agrandissement d'un étang de retenue, on arrive à une indemnité totale de 4200 francs soit pour les 11 moulins (d'Evegnée à Bressoux ) une somme de 46200 francs).

Il n'est pas douteux que d'autres réclamations et d'autres revendications se feront jour lors du dépôt du projet à l'enquête de commodo et incommodo et que nous serons amenés à leur faire la part de vérité qu'elles présentent et à rechercher les moyens d'y faire droit après avoir repoussé ce qu'elles auraient de faux ou d'exagéré.

Voici quelques sujets de réclamations formulées à cette époque :Mr Bartholomé Lovinfosse n'est pas d'accord sur le choix de comparaison de ses prairies avec les prairies de Mme Lewalle pour en déterminer la valeur. Il estime que sa parcelle 128a à une valeur bien supérieure au verger 134b,à raison de ce qu'elle est longée sur une étendue de 200 mètres par la route de Tignée à Evegnée, qu'elle est beaucoup mieux arborée, est moins accidentée et enfin plus rapprochée des habitations, qu'à ce dernier point de vue et à raison de sa situation particulière, les experts estiment même que la parcelle dont il s'agit doit être considérée dans une certaine limite comme pouvant être transformée en un « bien d'agrément » que ces raisons paraissent justifier la majoration de 34 centimes au mètre carré attribuée par les experts à la parcelle128a.Il conteste aussi l'estimation de la longueur de la haie vive qui entoure sa parcelle(indemnisée à 2 francs le mètre courant) et de ce fait réclame une indemnité plus forte afin de re-clôturer ce qui a été détruit par les travaux. Les expropriants refusent ce surplus d'indemnité se fondant sur ce que l'expropriation ne rendra nécessaire aucune clôture nouvelle, qu'au surplus elles demandent acte de leur engagement de ne pas clôturer la bande de terrain acquise et de la louer à son ancien propriétaire par un bail emphytéotique de 99 ans, au prix de cinq centimes et sous les seules conditions d'exploitation nécessaire à la protection des eaux(interdiction d'y mettre du fumier).(anecdote à ce sujet :Mme Crémer y étendait parfois le fumier sorti de l'étable, pendant la nuit).

Les expropriés craignaient aussi pour la survie des arbres, arguant qu'ils puisent de l'eau dans le sol et que, suite à l'irrigation, ces arbres pouvaient manquer d'eau et de ce fait être moins productifs. Les expropriants étaient toutefois d'accord d'allouer une indemnité de 65 francs pour un poirier se trouvant sur le parcours de la galerie dans la parcelle135a.

Les expropriés réclament aussi une indemnité pour la valeur de l'eau se trouvant dans leur propriété.

  1. la source qui jaillit dans le verger128a et produit la mare se trouvant dans un coin de verger tout contre la route et servant d'abreuvoir pour le bétail.
  2. la fontaine établie sur le chemin, laquelle est alimentée par une conduite placée dans le susdit verger

    Ces deux faits amènent à la conclusion que le sous-sol du verger doit former un véritable réservoir d'eau souterraine (divers suintements se produisent aussi le long du talus –débit calculé : 323 mètres cubes29 par jour).

    Le tribunal, se fondant sur les articles 641 et 552 du C.C. a attribué la propriété de la source et des eaux souterraines amenées de la parcelle128a jusqu'à la fontaine du chemin au propriétaire de la susdite parcelle et a reconnu à ces eaux une valeur propre à raison de leur utilisation possible. Suite à ce constat, les expropriés contestent l'indemnité accordée par m³ d'eau mais, comme le captage des eaux d'Evegnée ressemble assez bien à celui pratiqué par la ville de Liège en Hesbaye, les expropriants ont expliqué qu'ils se sont référés au prix donné aux Hesbignons : ceux-ci ne se plaignent pas et personne ne peut soupçonner, à la surface du sol, l'existence souterraine de la galerie.

    Plusieurs habitants (suite à l'enquête commodo incommodo ) avaient donc formulé des réclamations diverses. Il en est un, Mr Bony, plus tenace que les autres qui envoie une lettre de contestation quant au prix de l'eau octroyé, à la valeur des terrains, à l'assèchement de ceux-ci….et tout cela deux ans après la fin des travaux.

    Le secrétaire, excédé, répondit par des arguments dévalorisants pour notre petit village : Evegnée est une petite commune, elle est frappée d'une servitude militaire, le terrain y est maigre, pas d'industrie ni de maisons de campagne, défense de construire, les produits du sol et le bétail n'ont aucune renommée, il y a p trop d'eau (les habitants drainent leurs terrains). Le captage n'apportera que des bienfaits : eau plus propre, plus salubre, accès aisé aux pompes et fontaines…

    Après tous ces règlements de compte, la société de captage a pu commencer les travaux. Comme stipulé dans le cahier des charges, ceux-ci devront durer 12 mois, et l'entrepreneur, en l'occurrence Mr Brahy, sera passible d'une amende de 10 francs par jour de retard.Mais les travaux ont duré 2 ans(de juillet 1908 à juillet 1910 ). Mr Brahy était donc redevable d'une somme assez conséquente (3650 francs). Seulement, les paiements à l'entrepreneur avaient lieu au fur et à mesure de l'avancement des travaux et, faute d'argent, les communes n'ont pu satisfaire leurs obligations.En lieu d'argent liquide, elles ont délivré des mandats de l'import pour les sommes dues : ce qui n'arrangeait pas beaucoup l'entrepreneur car les conditions d'escompte de ces mandats en banque sont assez onéreuses. En date du 20 Mars 1912, Mr Brahy, par l'intermédiaire du gouverneur de la province, demande que l'intercommunale exécute cette transaction.

    Ce captage d'eau a donc permis aux habitants des communes de Bellaire, Jupille, Bressoux, d'être raccordés à l'eau alimentaire tandis que les habitants d'Evegnée étaient toujours contraints de puiser l'eau dans leur puits privé ou d'aller la chercher aux bornes-fontaines installées en deux endroits du village.Il en est pourtant qui ont eu un peu plus de chance : ce sont les quelques habitants du Matefosse. Comme la conduite d' adduction passait dans leurs prés, ils ont demandé et obtenu le raccordement à cette conduite(le document ci-après en atteste).

    Voilà pourquoi quelques privilégiés ont bénéficié de l'eau alimentaire depuis 1917 tandis que les autres devront attendre 1968 pour être raccordés à la distribution d'eau d'Eupen.

    Voici à présent le cahier des charges. Il vous permettra de constater que rien n'est laissé au hasard que ce soit le détail des différents travaux à effectuer ou la qualité des matériaux à employer. Il faut agréablement remarquer que l'on n'a pas oublié les conditions de travail pour les ouvriers : sécurité et sanitaire. En était-il de même pour les mineurs ou les ouvriers d'usine de ce début de siècle ?

    Origine de la « tuturette »

Les fermiers venaient donc chercher l'eau pour leur bétail à la pompe située sur le ruisseau au pied de la rue du Thier.Il fallait du temps et de l'huile de bras :pomper dans un seau puis verser dans le tonneau.En1955 ou1956 ,afin de faciliter leur tâche ,Monsieur Mathieu Mordant ,bourgmestre de l'époque et fermier lui-même ,fit installer un tuyau qui permettait de remplir directement les tonneaux .Il suffisait de placer l'ouverture sous la chute d'eau .

C'est Nicolas Pirotton et Francois Dortu qui furent chargés par la commune de creuser une tranchée à la pioche afin d'amener l'eau du ruisseau (retenue pour ce fait par un barrage situé à gauche de l'entrée de la galerie du Foeïtay )jusqu'au tuyau qui est encore là actuellement et abondamment utilisé .Ce tuyau fut fabriqué par Michel Buts .

Epilogue

Dans les années 1967-1968 les galeries de Retinne (la ravine de gauche et celle de droite )ont été déconnectées du pavillon de jauge car l'eau n'était plus potable et les communes de Bellaire Jupille et Bressoux n'y étaient plus raccordées .Seule ,la galerie Matte-Fosse était encore opérationnelle pour les habitants de cette rue .

Peu après ,Mr Bontemps a pris sa pension et personne ne l'a remplacé .La société a abandonné le captage car il fallait trop investir pour remettre tout en ordre en respectant les nouvelles normes requises .

Désormais , l'eau d'Eupen coule dans les veines du village d'Evegnée-Tignée .

Que tous ceux qui m'ont aidée à trouver les renseignements nécessaires en soient remerciés :

Mr Jean-Luc HENRY de la C.I.L.E.

Alphonse Massart Joseph Massart Guy Massart Mr André Jadot Mr Bonemme Irène Bontemps Mme Josée Paggen Mr et Mme Julien et Mariette Missaire Nicolas Pirotton Bruno Scholtissen

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